La plupart du temps je m’appelle Gabrielle de Stéfani Meunier
Nos vies font des ricochets
Dans La plupart du temps je m’appelle Gabrielle, nous faisons la rencontre de Gabrielle, une jeune fille débutant sa carrière d’éducatrice spécialisée. Elle nous amène dans son quotidien, ses pensées, mais aussi parfois dans la tête de Maude, la fille imaginaire que sa mère a inventée. Lorsque sa mère prend les traits de Maria, Gabrielle existe, et lorsqu’elle se nomme Suzan, Maude prend sa place. Désireuse de tendre la main à ceux qui ne veulent pas de son aide, la jeune fille se prend d’affection pour deux jumeaux, Jean et Lougan. Le premier est autiste, le second a un trouble de l’opposition avec provocation. Un peu comme l’eau et le feu, ils s’opposent en tous points. Ils ne donnent aucun répit au personnel de l’école, ni à leur mère Jasmine. Voulant donc en apprendre davantage sur eux et connaître la meilleure manière de leur venir en aide, Gabrielle rencontre la mère des jumeaux et se lie d’amitié avec elle.
Tout en s’apparentant à un récit, le roman de Stéfani Meunier recèle bon nombre de monologues : tour à tour, les personnages de Gabrielle et de Jasmine parlent d’elles-mêmes et de leur passé. À coups de chapitres courts, le roman laisse place aux pensées vagabondes des protagonistes, à des retours sur certains événements du passé et à l’histoire de Jean et de Lougan, laquelle oscille entre le bonheur et le malheur. Toute la beauté du livre de Stéfani Meunier réside dans les parallèles qui existent entre les personnages et leur passé, et qui s’emboîtent pour créer un tout. La jeune fille raconte son enfance, l’histoire de ses « deux » mères et de son père doux et gentil, son refus de quitter le monde de l’enfance à tout jamais, etc. La mère fatiguée narre la vie qu’elle mène avec les jumeaux dysfonctionnels, tout en racontant sa vie d’avant lorsqu’elle habitait sur une île. Le thème du double revient constamment dans le récit, comme si chaque personnage en reflétait un autre. Le style d’écriture harmonieux et sobre de Stéfani Meunier et l’intérêt que l’on peut porter à la découverte des histoires de chaque personnage font en sorte qu’il est facile de s’absorber dans la lecture de La plupart du temps je m’appelle Gabrielle. D’ailleurs, la fin vous laissera sans mots…
Elizabeth Joosten