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Les chroniques de Jérome

  • « Little Heaven » de Nick Cutter

    Le Mal est-il un principe qui habite chaque être humain, que nous le voulions ou non? Dans quelle mesure chacun d’entre nous doit-il composer avec une part plus ou moins obscure de son âme, de son esprit? Posé ainsi, le problème semble purement métaphysique, bien que, depuis Freud, la psychologie y ait son mot à dire. En 1898, Henry James posait en partie la question en donnant à sa fameuse histoire de fantôme ce « tour d’écrou supplémentaire » qui la rendait si délicieusement subversive. La narratrice rejetait sur la responsabilité d’anciens gardiens la personnalité malfaisante des deux enfants dont elle avait la garde; James avait eu le mérite de ne pas donner de réponses claires (d’autant plus que la santé mentale de la narratrice était pour le moins chancelante!).

  • « Frankenstein lui a échappé » d’André Caron

    Cette année marque le bicentenaire de la publication de Frankenstein ou le promothée moderne de Mary Shelley. Qu’on l’ait apprécié ou non, ce roman gothique est devenu un monument de la littérature anglo-saxonne. C’est que le roman a rencontré, dès sa parution, un immense succès. S’est ensuivie, tout au long du XIXe siècle, une panoplie de pseudo-adaptations au théâtre. Le XXe siècle n’est pas en reste : dès 1910, Thomas Edison en produit la première adaptation cinématographique (les curieux peuvent d’ailleurs visionner facilement ce court métrage sur la Toile). Au total, à partir de cette date et ce jusqu’à nos jours, le savant et sa créature se retrouveront plus de 150 fois à l’écran.

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    « Star Wars » de Will Brooker

    La superbe collection BFI : Les classiques du cinéma chez Akileos poursuit son développement avec la publication de l’étude d’Ian Brooker sur Star Wars. La récente sortie en salle de l’épisode VIII m’apparaît comme un moment idéal pour se plonger dans la lecture de ce texte qui est fascinant à maints égards.

    Ian Brooker introduit son sujet par une revue historique de la réception critique du film. On a beaucoup glosé sur l’importance de ce film en tant que blockbuster, réduisant la séduction qu’il exerce à la simplicité de son scénario, un soi-disant manichéisme qui ne peut que charmer les plus jeunes. Mais Brooker va plus loin : en jetant un œil aux premiers films de Lucas, tant ses courts métrages que ses longs (THX 1138 et American Graffiti), il remarque que l’on a fait du père de Star Wars un artiste expérimental qui aura sacrifié sa vision au profit d’une entreprise commerciale.

  • Streamliner, de ‘Fane

    ‘Fane est un scénariste accompli. Il utilise les archétypes (qu’il mettra un malin plaisir, au cours du récit, à mettre sens dessus dessous) pour mettre en scène des personnages dont quelques mots lancés ici et là suffiront à établir l’historique et la personnalité. Sa galerie de personnages, dans laquelle les femmes ont une place de choix, ferait l’envie d’un Quenton Tarantino (de toutes évidences, les films du célèbre cinéaste sont ici une source d’inspiration). Son style graphique est aussi sublime que parfait pour ce type de récit : on sent le style nerveux dans chacune des pages, à mi-chemin entre le dessin à main levé et l’œuvre à laquelle on porte une grande attention aux détails. Les voitures rutilent et fleurent bon l’essence et l’huile!

  • Lovecraft : la part sombre de la littérature

    Le « héros » lovecraftien par excellence est un homme blanc, généralement cultivé, parfois scientifique, et souvent anonyme. Ses recherches l’amènent toujours à découvrir l’existence de formes de vie antédiluvienne, des cultes inconnus, des savoirs oubliés, des rituels de sorcellerie, etc. Ainsi, le fameux Cthulhu de la nouvelle éponyme (et qui a donné son nom à la cosmogonie lovecraftienne) est une créature venue des étoiles bien avant l’avènement de l’Homme. Son existence est révélée au personnage principal par la découverte de statuettes servant dans des cultes qui lui sont rendus par des peuplades considérées par l’auteur comme arriérées (des esquimaux du Groenland et des ruraux de la Louisiane).

  • Dirty Sexy Valley d’Olivier Bruneau

    À la lecture de Dirty Sexy Valley, on a l’impression que son auteur, Olivier Bruneau, a visionné les films d’horreur américains de l’âge d’or du slasher (début des années 1980) et les films dits eurothrash (particulièrement du cinéma italien des années 70 et 80) en prenant soigneusement des notes. Comme si cela ne suffisait pas, l’auteur profite de la liberté relative que lui donne l’écriture et multiplie les effets gores, les scènes de sexe et les séances de torture à un rythme qui laisse le lecteur pratiquement essoufflé.

  • Soft City, Pushwagner

    Il suffit de jeter un œil à l’œuvre de Pushwagner, le peintre (site officiel : www.pushwagner.no), pour comprendre que la seule et unique bande dessinée qu’il ait réalisée dans sa carrière, Soft City, sera une singulière expérience. Les quelques tableaux et illustrations qu’on y retrouve sont de glaciales représentations d’une violente déshumanisation causée par la bureaucratie et ses avatars (blocs d’appartements, armée, etc.). Soft City s’inscrit dans la même lignée thématique.

  • Wonder Woman : une mythologie du XXe siècle

    Ce volumineux album contient 18 aventures de la princesse amazone, du tout premier récit complet publié à l’été 1942 jusqu’à un court épisode paru en 2015. Les récits ont été sélectionnés afin de représenter les diverses incarnations marquantes du personnage, de ses combats titanesques avec ses némésis traditionnelles aux combats cosmiques de la Ligue de Justice en passant par ses aventures plus mythologiques à la fin des années 1980. Ce qui rend cet ouvrage encore plus palpitant, c’est qu’il dresse en même temps un panorama de l’histoire des comics américains, les fameux âges de la bande dessinée super-héroïque : l’âge d’or (des années 1940 jusqu’aux années 1960), l’âge d’argent (fin des années 1960 et les années 1970), l’âge de bronze (années 1980) et l’âge des ténèbres (années 1990 : mentionnons que le nom donné à cette période n’a rien à voir avec une quelconque allusion à l’effervescence artistique, mais réfère davantage aux thématiques explorées).

  • Nous, d’Evgueni Zamiatine : le bonheur dans une prison de verre.

    Nous est un roman exigeant. Entièrement écrit sous forme de notes par le personnage principal et narrateur de l’histoire, il n’est pas seulement une description d’un univers totalitaire cauchemardesque. L’auteur écrit aussi dans la plus pure tradition du classicisme russe : son style est une plongée d’une redoutable rigueur dans la psychologie d’un personnage qui n’a d’autre choix que de remettre en question l’entièreté de son monde, voire de son existence. Parce que D-503 est souvent bouleversé (après tout, il est façonné par l’État totalitaire!), il analyse ce qui lui arrive parfois comme étant des rêves, d’autres fois il semble incapable de terminer son idée tant il est sous le choc. Mais le lecteur ne peut manquer d’être fasciné par le voyage auquel il est convié, d’autant plus que l’imaginaire de Zamiatine a, avec une grande finesse, évité le piège ultime de la science-fiction classique : la caducité des technologies et des découvertes (on se rappelle, par exemple, ces Premiers Hommes dans la Lune de H.G. Wells).

  • Alain Deneault – De quoi Total est la somme ?

    L’histoire de Total débute durant la Grande Guerre, période durant laquelle la France connaît une pénurie d’hydrocarbure. C’est ce qui mène à la création de l’entreprise en 1924 (sous le nom de Compagnie française des pétroles) car le gouvernement français désire s’émanciper des entreprises anglo-saxonnes. Deneault nous fait découvrir les rouages d’une administration à la fois opaque (afin de masquer liens de l’entreprise avec les hommes d’état par exemple ou les placements effectués par celle-ci dans les paradis fiscaux, un thème cher à l’essayiste) et amorale.

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