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«P’tit gros» de Benoît Grelaud

9782215134459
Grelaud, Benoît – P’tit gros | Fleurus

À partir de 13 ans, 4.5 étoiles sur 5

Axel est un jeune adolescent sensible, rêveur, introverti et passionné de littérature. Depuis l’abandon soudain de son père, il se replie sur lui-même et tente d’atténuer sa souffrance par la surconsommation de nourriture. Face à son embonpoint, les autres élèves de son école laissent aller leur haine, ils le violentent et le harcèlent sans relâche. À la maison, Axel se sent émotivement loin de son frère et de sa mère, qui semblent vivre chacun dans une bulle. Il n’a aucun ami, sinon son journal intime, qu’il écrit en s’inspirant des écrits de Marcel Pagnol. Meurtri et abattu par l’agressivité mesquine des autres élèves et cette solitude, il se laisse broyer par la noirceur, et tente même de s’enlever la vie. Par chance, son grand frère, Tony, boxeur talentueux qui semble ferme et même rude de prime abord, l’en empêche et lui fait part de sa propre souffrance. C’est alors que quelques brins de lumière parviendront jusqu’au jeune garçon. D’un lien qui renaît avec ce frère, qui le pousse maladroitement, mais par amour fraternel, à ne pas se laisser terrasser par la vie, puis d’une amitié avec Julie, une jeune fille exceptionnelle qui refuse de percevoir d’Axel que son apparence physique. Cette dernière lui insufflera le courage et la confiance nécessaires pour se lancer dans une nouvelle étape de sa vie. Les changements physiques et psychologiques s’opèrent, l’amenant à devenir un homme plus fort. La vie ne lui faisant pas de cadeaux, les coups durs se succèdent inlassablement, mais ne réussissent pas à le terrasser. Par exemple, le décès subit de sa mère, faisant de lui un orphelin, la tentative de viol qu’a vécu Julie ou l’accident de moto dramatique de son frère. Il finit par se relever, chaque fois, avec espoir et rage de vivre.

Ce roman se déroule sur une période de 14 ans, soit de 2004 à 2018. Par des chapitres courts et bien répartis, l’auteur nous transporte habilement d’une époque à l’autre dans la vie d’Axel, qui passe du jeune garçon solitaire vivant avec un surpoids terrible à un espoir national aux jeux Olympiques, fier et entouré des personnes importantes de sa vie. Chargée d’émotions et de drames, cette lecture reste douce et percutante, sans faire dans le mélodrame. L’écriture est efficace et directe. Il pourrait parfois être difficile, pour un lecteur qui a peu vécu de profonds malheurs, de capter l’implicite dans la sobriété qu’a choisie l’auteur pour décrire les épreuves douloureuses vécues par les personnages. Pour quelqu’un ayant vécu des situations similaires, cette absence de détails donne un caractère respectueux et solennel à l’œuvre.

De prime abord, l’apparence du livre est intrigante, attirante, mais surtout révélatrice de ce que nous pouvons nous attendre du roman. De multiples symboles et mots-clés laissent présager des sujets abordés (cœurs brisés, idées noires, orages…), au centre desquels trône un œuf dont la coquille commence à craquer, signe d’espoir et de renouveau qui définit bien l’histoire.

L’une des forces de ce roman réside très probablement dans les émotions profondes que vivent Axel et son frère. Benoît Grelaud nous les fait ressentir avec force. La personnalité de ces deux personnages, complexe mais cohérente, évolue au fil de la lecture, démontrant une bonne réflexion de la part de l’auteur. Par exemple, Axel, enfant renfermé et pessimiste aux premières pages, devient tranquillement un jeune homme ouvert et confiant. Tony semble vivre une grande colère intérieure et l’extériorise avec brutalité. Rapidement, nous apprenons à comprendre son sentiment d’impuissance face à la déchéance de son frère. J’aurais par contre aimé voir autant de complexité dans le développement des personnages féminins. Lili et Julie, et dans une moindre importance leur mère et leur grand-mère, semblent être trop parfaites, sans failles, dans une seule saveur, telles des saintes dans la vie d’Axel et Tony.

Ce qu’il nous reste de cette lecture inspirante est, bien sûr, un fort besoin de foncer dans la vie, aller au bout de ce que l’on est et de ce que l’on pourrait être. Mais aussi la conscience de l’importance de prendre soin des personnes qui nous entourent, qu’on aime, qui forment notre famille, nos amis.

« L’esprit gagné par la mélancolie, il prend ses gants, son sac de sport et file à la salle afin d’évacuer ses idées noires. Pour frapper dans le vieux sac du fond, matérialisation de tout ce qui pèse sur lui. » p.237

Caroline Poitras, technicienne en bibliothéconomie

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Jeunesse, Suggestions de lecture